Originaire de Bédoin, petit village au pied du mont Ventoux, à 12 kms de Carpentras et 35 kms d’Avignon.
A la fin du XIVe siècle, Antoine Florent était Seigneur de St Estève, hameau à deux lieux (environ 8 kms) de Bédoin. Il ne possédait alors que quelques arpents de terre.
C’est en 1549 que les Florans (l’orthographe a changé) reçurent du pape Paul III leurs lettres de noblesse car en effet, depuis 1274, le Comtat Venaissin dont Bédoin faisait partie, dépendait du pape.
Comtat Venaissin par Stéphano Ghebellino (vers 1580) Médiathèque Ceccano d’Avignon
En tant que nobles, les de Florans ont alors armes et devise. Leurs armes sont « D’azur au sautoir d’or accompagné de trois étoiles, une en chef et deux en flanc t une fleur de lys en pointe, le tout d’or, la fleur de lys surmontant un croissant d’argent« . Quant à leur devise : « Florentius, floret, floruit atque florebit » (Florent fleurit, a fleuri et fleurira).
Armes et devise se retrouvent encore aujourd’hui sculptées au pied des vitraux, derrière le maître-autel de l’église N.D. de Chambly.
En 1549, Denis de Florent épouse Cécile Boutin.
De ce mariage nait un fils, Laelius, qui se marie en 1578 avec Maria Benedicti. Avec leurs deux fils Jacques et André, la famille se divise en deux branches :
- celle de Jacques qui s’établit à Carpentras
- et celle d’André qui s’établit à Arles.
C’est cette branche cadette, sur laquelle porte l’essentiel de ma documentation, que j’ai pu étudier de façon approfondie.
André de Florans, marié à Françoise Seguin n’eut pas moins de 10 enfants dont certains s’illustrèrent dans l’armée comme Claude qui mourut en 1675 lors de la même bataille où Turenne mourut aussi, et Paul gravement blessé en 1674, qui dut renoncer à sa carrière militaire. Son mariage en 1702 avec Reine de Privat, fille d’une grande famille de la région d’Arles, permit aux de Florans de s’implanter alors en pays d’Arles, à Molières (commune de Miramas) et au Mas d’Auge (commune de Fontvieille) Voir la page » Famille de Florans: son Patrimoine »
Deux fils naquirent de ce mariage :
- Tout d’abord François-Xavier qui, en tant qu’aîné, hérita de ces terres (Portrait de la couverture du livre)
- Quant au second, Joseph-Jean-André, capitaine au Royal-Artillerie, il se trouva en 1740, en garnison dans l’Oise, à Chambly, où il se lia d’amitié avec Jean-Baptiste de Tissandier, ancien major au régiment de Guyenne et dont l’épouse Jeanne de Belloy appartenait à une noble famille locale.
En 1741, il épousa une de leurs deux filles : Marthe. Ils eurent 5 enfants : 4 garçons (François-Henri, Louis-Paul, François-Xavier, André-Louis), et une fille : Marthe-Adelaïde. Leur destin fut parfois tragique (Voir plus loin : Une page sombre de l’histoire de Bédoin…)
A la suite de mariages bien arrangés, les de Florans constituent au cours des siècles un vaste domaine (Voir plus loin la famille de Florans son patrimoine.)
Ils vivaient donc, en Seigneurs, des revenus de leurs terres. Mais appartenant à la noblesse d’épée depuis le milieu du XVIe siècle, tous leurs fils, ou presque, furent destinés à la carrière militaire où ils reçurent maintes décorations et citations.
Ainsi participèrent-ils aux différents conflits des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles. L’un d’entre eux, André-Louis, s’illustra même, avec son régiment, le Royal-Auvergne, dans la guerre d’indépendance des Etats-Unis lors de la victoire de Yorktown en 1781.
Quand ils n’étaient pas à la guerre, ils allaient de garnison en garnison, dans les places fortifiées du Nord au Sud de la France en passant par l’Est (voir le chapitre III du livre Petite chro…).:
Ils restèrent ainsi en poste aux armées jusqu’au décret de juin 1793 excluant les « ci-devant » nobles de tout emploi civil ou militaire.
Au moment de la Révolution, trois d’entre eux furent guillotinés: André-Louis et son épouse et sa sœur Marthe-Adélaïde
Une page sombre de l’histoire de Bédoin…
Au moment de la Révolution, le village, de 2720 h, comprenait deux classes de population :d’une part des cultivateurs, artisans et marchands, d’autre part des bourgeois, des prêtres et des nobles catholiques. Ses habitants, restés très attachés au Pape dont ils n’étaient séparés que depuis 1791, acceptaient mal les changements dus à la Révolution. Aussi Bédoin apparaissait-il comme un foyer royaliste et papiste ce qui lui valut le surnom de « Vendée du Midi » Trois familles nobles étaient à la tête de ce mouvement contre-révolutionnaire : Les Balbany de Vaubonne, les de Bélizy, et les de Florans
1794 : c’est « la Terreur » – les biens de 13 émigrés furent confisqués et quelques républicains s’emparèrent de la mairie. Dans la nuit du 12 au 13 floréal an II (1 et 2 mai 1794), l’arbre de la liberté, planté deux ans auparavant par les révolutionnaires, fut déraciné et abandonné au pied des remparts dans «le pré aux porcs »… vrai sacrilège pour les républicains. Le bonnet phrygien qui le surmontait fut jeté dans un puits. Quant à l’affiche informant des décrets de la Convention, elle fut arrachée et trainée dans la boue. Des sanctions s’imposaient donc. L’administration d’Orange et de Carpentras avisa alors un certain Maignet, représentant du gouvernement révolutionnaire, qui décida d’envoyer l’agent national Le Go avec l’armée commandée par Suchet, pour arrêter les membres de la municipalité pour n’avoir pas fait enfermer les ci-devant nobles de cette commune. Les militaires vivront chez les habitants, aux frais de la commune, jusqu’à ce que les coupables soient dénoncés. Ce fut l’occasion de perquisitions accompagnées de vols et de destructions diverses. Les conseillers municipaux, les nobles, les prêtres et autres notables furent arrêtés et parqués dans l’église. Mais personne ne dénonça les coupables. Furieux, Maignet menaça de détruire la commune et, le 20 floréal (9 mai), le tribunal criminel arriva à Bédoin, la guillotine aussi…
Maignet cependant hésitait : les exécutions ne pouvaient avoir lieu qu’avec l’accord de la Convention à Paris. Par conséquent, compte tenu des délais de route, la réponse n’arriva que le 7 prairial (26 mai). Cela faisait trois longues semaines que la troupe était arrivée. Le 9 prairial (28 mai) le Tribunal s’installa en plein air sur la grande place (actuelle place des écoles) et, après avoir délibéré, rendit son jugement : 63 hommes sont condamnés à la peine de mort : en troisième place André-Louis-Florans-Molière et en quatrième place Cécile Claptiers son épouse. 35 furent guillotinés mais pour aller plus vite (l’odeur devenait insupportable), les 28 autres furent fusillés. Tous furent jetés dans une fosse commune sur la route de Flassans. 10 furent mis hors la loi, 2 condamnés aux fers, 13 condamnés à la réclusion comme suspects. 1 paysan sans cocarde fut condamné à 1 an de prison. Pour finir, Maignet ordonna de faire disparaitre le village en l’incendiant. L’église, la mairie le château mais aussi des moulins à huile, des magasins de soie et 433 maisons furent en grande partie détruits. Le village fut interdit et le territoire de la commune réparti entre les communes voisines.
Un an plus tard (mai 1795) la Terreur est terminée ; Bédoin est réhabilité ; ses terres restituées. On dressa alors une colonne expiatoire surmontée d’une urne funéraire sur la place où avaient eu lieu les exécutions.
Cette colonne du souvenir est sur la place de Bédoin
La plaque sur la colonne
En 1866, les familles des victimes firent construire une chapelle à l’emplacement de la fosse commune :
Chapelle de Beccaras.
De ce drame sanglant, il y eut un rescapé : un garçon de 3 ans 1/2, François-Marie de Florans, dont, on l’a vu, les parents avaient été guillotinés. Il fut élevé à Bédoin par un ami de la famille, Jean Jacques Martin qui fut témoin de son mariage avec Jacquette-Caroline de Cordoüe, future Marquise de Florans, en janvier 1820.
Un oncle par alliance Joseph-Jean-Pierre-Félix de Florans, qui avait émigré, fut amnistié en 1803, ce qui lui permit de récupérer le domaine et le château des Florans à Bédoin. Il désigna François-Marie comme héritier. Celui-ci entra en possession du domaine ancestral de Bédoin en 1823 à la mort de celui-ci.
Après la Révolution, les de Florans se replient sur leurs terres sans comprendre que le monde a changé.
Un mariage va consacrer alors l’union de la famille de Florans et de la famille de Cordoüe :
Le 30 janvier 1820, François-Marie de Florans (dont les parents avaient été guillotinés) seul héritier de cette famille, épouse Jacquette-Caroline de Cordoüe, ce qui va permettre au « domaine » d’atteindre sa dimension maximale (2200 ha) en 1875.
C’est à cette époque que commence le déclin qui s’achève en 1937 par la disparition de la famille de Florans à la mort de Florette dernière Marquise de Florans, sans héritier. voir VIII et IX de la Petite Chronique….